Les élections de 2012 risquent de n’avoir aucun intérêt ni enjeu, si ce n’est une bataille entre supporters du PS et de l’UMP, sous réserve que le PS ait réellement la volonté d’occuper le pouvoir. Les élections démocratiques récentes ont toujours dévoilé cette passion pour la conquête du pouvoir, avec à la base un minimum de programme, d’engagement, de projets, d’idées. Avoir un programme c’est bien mais s’il n’y a pas de moyens pour le réaliser, autant mettre la clé sous la porte. C’est ce que devrait faire l’opposition au vu de la situation financière de la France, avec des déficits énormes et une dette devenant un vrai boulet pour remettre ce pays sur la voie d’un dynamisme politique conséquent.
Combien ça coûte ? Cette année, plus de 100 milliards de déficit, en 2010, plus de 100 milliards de déficit et en 2011, à peu près autant. Sans compter le déficit de la Sécu et l’endettement des collectivités locales. La France est en état de surendettement. C’est certes gérable du point de vue comptable mais sur le plan politique, la dette abyssale va devenir un obstacle à la réalisation de tout projet moderne dans le sens où il nécessite des moyens. Même s’il y a un désir d’avenir, il n’y a pas d’avenir possible pour ce qui concerne les réalisations post-2012 en vue du bien public. Les programmes en cours seront achevés dans un contexte de surendettement. Le seul enjeu politique en 2012 sera d’assurer le fonctionnement de ce qui est en cours et d’éviter la faillite du pays. Un horizon pas très enthousiasmant pour les politiques et les militants. Heureusement, si dieu a fait les uns puissants et les autres soumis, il a fait les uns éclairés et les autres borgnes et l’on saura compter sur une cohorte de militants aveugles des réalités budgétaires mais prêts tels des chiens fidèles à pousser de la voix dans les meetings de leurs chefs et le soir coller des affiches avec une loyauté aussi exemplaire que l’aveuglement est édifiant. Ne pas voir, voilà un élément de sagesse qu’on devra pratiquer en 2012 lorsque l’on est militant. Et quand on est politicien, il faudra une bonne dose de talent d’acteur pour faire semblant de vouloir le pouvoir dans de telles conditions. Honnêtement, aucun chef d’entreprise ne songerait à reprendre les affaires de la France. C’est du bon sens. Qui voudrait d’une entreprise endettée ? Par contre, le politicien n’a pas à avoir de crainte, il ne risque rien du point de vue financier. Si la boîte France coule, il garde ses acquis et tout ministre saura compter sur une correcte retraite. Ce qui n’est pas le cas d’un repreneur d’une entreprise en liquidation qui risque de sa poche s’il fait une mauvaise affaire.
Dire que Sarkozy a tué les élections de 2012 est certainement exagéré. Il subit aussi un héritage. En fait, notre président très réactif gère au jour le jour et ne se préoccupe guère du prochain scrutin, sauf en se rasant de temps en temps. Creuser les déficits ne lui pose pas de problème puisqu’il sait qu’il résoudra tous les problèmes et donc en 2012, il sera le mieux placé pour gérer les problèmes qu’il a occasionnés lors de son mandat. Il n’y a plus de rupture ni d’avenir. Le progrès n’est plus à l’ordre du jour, ni le changement. Le seul objectif est d’éviter le naufrage d’un pays dont la situation est la conséquence de multiples erreurs passées et accumulées. L’image venant à l’esprit est celle d’une automobile mal entretenue. Elle a roulé et roulé mais le joint de culasse est rongé, les suspensions sont mortes, l’embrayage a des ratés, la courroie de distribution doit être changée, comme les pneus et les plaquettes, alors que le système électrique est à revoir et que les roulements à billes font des bruits bizarres, sans compter la carrosserie bien cabossée.
La France est un pays cabossé et usé de bien des erreurs commises par le passé. Peut-on en énoncer quelques-unes ? Le premier regard se porterait sur le rapport de la cours des comptes, juste un symptôme de mauvaise gestion. Ensuite, on pourrait voir diverses causes ayant creusé le déficit, soit en asséchant la manne fiscale avec toutes le niches et autres réductions contraires au principe de l’impôt car elles exemptent les riches d’une juste contribution fiscale à la nation. D’un autre côté des dépenses inconsidérées ont été effectuées, dans l’armement, avec des dérives sur le matériel militaire, des mauvais choix industriels, des épisodes calamiteux comme le Clémenceau qu’il aurait fallu couler, ce qui nous aurait économisé un milliard. Puis le désamiantage, autre gouffre financier, puis les dépenses pour le vaccin de la grippe A, puis la mauvaise gestion des hôpitaux avec du personnel étranglé par des tâches bureaucratiques, puis le manque de courage dans la gestion de la Sécu et le rôle néfaste des mutuelles vivant en parasite sur la santé et de plus, encourageant le gaspillage thérapeutique en remboursant sans compter. D’autres fardeaux budgétaires sont venus se greffer, avec le « personnel invisible » de la fonction publique et territoriale (comme la matière noire de l’univers) échappant aux comptes de la Nation et pas vraiment indispensable à ce qu’on entend ça et là. Bref, la France vit sur trente ans d’erreurs accumulées et dont l’effet se renforce avec la mondialisation et la montée des pays émergents qui ont la légitimité à s’enrichir eux aussi. Mais les problèmes sont aussi sociaux. Que dire de l’abandon des banlieues et de la gestion du chômage. Et les médias, et la décivilisation… Quant à Sarkozy et son gouvernement, on ne peut pas dire qu’il a résolu des problèmes. Il a écrémé la fonction publique mais sa gestion technocratique a renforcé la bureaucratie et la concentration. Pas de quoi espérer un retour à l’équilibre. Ce n’est pas en mettant une commission sur chaque problème qu’on le résout. Mais on peut laisser croire au citoyen qu’on s’en occupe et c’est peut-être là le souci de l’équipe gouvernante.
La France ne va pas sombrer. Mais elle n’a pas d’avenir. En 2012, le seul horizon politique sera de proposer un plan pour sortir des erreurs passées. C’est ce qui fera l’étonnante singularité de ce scrutin dont on ne sait pas encore si les candidats ont réellement pris la mesure. Pour la première fois dans l’histoire de la cinquième République, les électeurs ne se détermineront pas sur des choix offrant une innovation ou un progrès pour l’avenir. Car l’enjeu majeur sera de réparer les erreurs. Cela risque de ne pas être passionnant, excitant, sexy et enthousiasmant, sauf pour les militants des partis mais nous savons bien que quand on est aveugle, on s’imagine faire de grandes choses. Gilbert Montagné croit qu’il est un génie de la pop. Il suffit de s’écouter et le tour est gagné ! Il y a fort à parier que les journalistes donneront l’illusion presque parfaite de suivre la campagne politique de 2012. Et de faire semblant de trouver un enjeu. Car les jeux sont faits et le job peu enviable de président reviendra naturellement à Nicolas Sarkozy.
Ne pas oublier une chose. Il y a une vie en dehors de la politique. Pour l’instant, il n’y a pas urgence pour le citoyen éclairé à s’occuper du cours du monde. Ça ne sert à rien. Il y a trop de borgnes. Il faut juste rester debout et vivant. Mais il faut se préparer en cas de situation d’exception.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire